Juste avant
Dimanche au zénith. Je suis à la fête des libertés
organisée par le parti socialiste au zénith de paris. Pourtant l’ambiance est
plombée. La foule militante n’est pas là. La salle à moitié vide, les élus qui
rentrent dans la salle ont du mal à cacher leur dépit. Chacun tente de faire
bonne figure, les jeunes se lèvent parfois et portent leurs pancartes de
manière maladroite. Les interventions sur la tribune sont pourtant de bonne
tenue mais les paroles se noient dans la gêne commune qui règne dans la salle.
Journalistes, organisateurs, rares militants, chacun voit bien le malaise.
Alors chacun tente de trouver sa solution. Le journaliste, le cynisme. Le
La pause du déjeuner me permet de traiter mes images. Dans
la salle de presse, j’ai un peu honte d’afficher sur l’écran les photos des
militants désabusés que j’ai fait ce matin. C’est pourtant ce qui se passe. Je
transmets au journal et téléphone au service photo. Normalement j’ai une grande
photo, mais ça peut bouger. Nous décidons d’attendre les images que je vais
faire cet après midi pour décider. Un membre du service d’ordre vient s’asseoir
à côté de moi. Il s’effondre sur la chaise en plastique qui plie sous son
poids. Comme un enfant il me dit : « là je crois que c’est le truc de
trop » il me dit ça sur le ton de la plaisanterie mais je vois bien qu’au
fond de lui-même, l’esprit militant qui l’anime souffre un peu.
14h reprises des débats. Les discours s’enchaînent. Cette
fois Martine Aubry prendra bien la parole en fin de journée. Je fais très peu
de photos. Je me concentre sur la manière dont je vais photographier son
intervention. Exercice sans cesse répété et difficilement renouvelable. Je me
tiens à côté de la coulisse, juste au pied de l’escalier qui mène à la scène.
Soudain j’aperçois la première secrétaire qui sort du rideau. Elle se tient
prête à prononcer son discours. Elle attend entourée de son directeur de
cabinet et sa proche collaboratrice. Je m’approche très doucement. On ne me dit
rien. Le membre du service d’ordre qui s’est assis à cote de moi tout à l’heure
me sourit. La collaboratrice me regarde mi autoritaire mi amusée. Bon. Pas
d’interdiction précise, je suis implicitement autorisé à rester là. C’est une
bonne situation. La politique attend son tour. Personne n’ose vraiment
contrarier sa concentration. Devant elle les techniciens se pressent, les
équipes se mettent en place. Elle ne bouge pas. Bras croisés, elle écoute les
discours en cours. Je remarque une flèche rouge sur le rideau qui désigne
habituellement l’ouverture du rideau. Je m’amuse à croire qu’il s’agit d’un signe
pour m’indiquer ce que je dois photographier…soudain Martine Aubry se cache à
nouveau les yeux. Tout le monde me regarde. Elle me dit « vous avez une
lumière là… » je regarde mon appareil. Les gens autour de moi, et je dis
« mais…non…je vous promets » elle me dit « mais si là.. » Et puis elle vient vers moi. Elle
me prend les mains. Je sens que les siennes sont glacées. Dans le même temps
elle s’adresse à quelqu’un juste derrière moi. C’était un technicien qui
faisait une photo avec son appareil compact. La lumière c’était lui.. Martine Aubry
me dit « excusez-moi mais j’ai eut un problème à l’œil et je sui stressée
avec ça.. » Elle me tient toujours les mains. Je ne parle plus à la femme
politique. J’ai l’impression de parler avec ma mère… je réponds « mais je
vois bien que ça vous stresse » « ben oui mais c’est pas facile.. » Juste après elle se
retourne et se positionne à nouveau à sa place. Tournée vers la tribune, elle
attend toujours son tour. La politique à repris le dessus. Je continue alors à
faire mes images. Le rideau noir, la lumière de la scène de côté, le flèche
rouge, la politique dans la situation juste avant. Juste avant son discours.
Juste avant d’énoncer les mots qui seront enregistrés et qui se répèteront
jusqu’à demain dans les journaux. Ça y est, c’est à elle. On l’appelle sur
scène. La mise en scène peut démarrer. Je la laisse aux autres. J’ai eut ce que
je voulais. Je vais transmettre ces images là.