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Images du Quotidien
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19 janvier 2009

Le Thé

BESSON059
Je me rends compte que les images ont besoin de temps pour trouver
leur place...comme tout le monde.
J’ai fait cette image il y a trois jours, autant dire une éternité pour moi!
Je ne pensais pas que ce sujet vaudrait que le coup que j'en parle, et
puis le temps faisant son affaire les instants de ces jours là se sont
inscrit dans ma mémoire. Le souvenir s'est mué en réflexion. L'envie de
partager à fait place au doute.
Donc, ce jour là, vendredi, j'étais sur le premier déplacement d'Éric
besson dans ses nouvelles fonctions de ministre de l'immigration et de
l’identité nationale. Le programme stipule deux visites distinctes. La
première au siège de la police aux frontières pour une présentation de la
politique de répression, et une deuxième visite au siège d'une
association qui fait de l'alphabétisation à destination des populations
immigrés d'origine turque. Après avoir suivi, toute la matinée, le cortège
de communication ministériel, nous nous retrouvons dans cet endroit
niché au cœur du 10e arrondissement de paris. La file des voitures de la
suite du ministre bloque la rue. Personne ne passe. Besson se fait faire
une présentation rapide des activités du lieu. Les personnes en charge
de l'enseignement lui déroulent l'argumentaire qui justifie leur existence. La pédagogie, l'apprentissage au service de l'intégration.
Le nouveau ministre me semble loin. Déjà grisé de son nouveau statut. Il se prend au jeu. Nous ne sommes pas étrangers à son sentiment.
Caméras, photographes sommes assis par terre, glissées entre les
personnes habituellement là pour assister au manège de la
communication qui se joue. Éric besson écoute. Éric besson acquiesce.
Éric besson approuve. Nous enregistrons. Les mouvements de tête. les
regards soutenus. Tout est fait pour installer le climat de l'homme
nouveau qui veut se démarquer de son successeur. Alors nous faisons
comme ci cela ne nous gênait pas.. Je suis mal à l'aise.
On se presse, comme toujours. Il faut tenir le programme. Les
responsables de l'association proposent de boire un thé. le ministre joue le répertoire de la complicité. Il fait mine de connaître les coutumes en
vigueur, mais il se trompe. Aucune importance, personne ne lui fera
remarquer. Alors l'assemblée s'assoit dans un coin de la grande salle. le
Ministre, les responsables de l'association. On apporte le thé. Les
objectifs et les micros sont disposé tout autour. Je me trouve une place.
Je me dis que peut être il y a une image à faire. Pour l'instant, je ne
pense pas en avoir une seule. Alors, il faut bien que je me concentre.
On amène le thé. Le ministre le laisse refroidir. Il le préfère comme ça
nous dit il. Puis, après voir écouté ces interlocuteurs, il le prendra, ce
thé. Il le sucrera et remuera doucement le liquide maintenant tiède
devant nos yeux en attente. Je photographie ce moment là en me
demandant vraiment à quoi il pense. Je n'en sais rien. Je veux lui laisser
le bénéfice du doute. Croire le ministre sincère dans ces intentions.
L’homme qui tient les dossiers juste à côté attire mon attention. Il est
l'aimant de la réalité qui se fait pressante. "il faut y aller monsieur le
ministre..."
Le ministre justement, étire le temps. Il sourit discrètement se sachant
enregistré sous toutes les coutures durant ce moment là. Il sait, lui,que
c'est important. Alors il relève la tête et nous regarde en disant "désolé,
nous avons du thé et pas vous..." Il prolonge le sourire et boit en faisant bien attention de ne pas aller trop vite. Les images se fabriquent tout autour de moi. Les déclenchements des appareils photos, les caméras qui suivent les mouvements du ministre. Je participe, évidemment. Le ministre pose son verre. Le sourire s'est transformé en satisfaction. Il se lève. "allez, on y va"
Il salut. Il remercie. Le cortège se remet en mouvement. Chacun retrouve son rôle. Agent de sécurité, attaché de presse, conseillers. Ils sont déjà ailleurs. Je tente de suivre. La rue, la voiture, la portière. "merci, au revoir!"
C’est fini. La rue est débloquée. le temps d'un thé cela s'est
suspendu. Maintenant tout à repris sa place. Ça a duré 50 minutes.

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Commentaires
F
c'est fort comment avec le temps, tu formules une histoire, une fable, de l'instant que tu as ressenti, est ce la photo qui inspire la fable ? est-ce l'intuition de la fable qui inspire la photo ?( comme un proto évenement... insidieux, latent dans tout le rituel dont ministres, photographes et autre conseillers participent dans une totale absence de candeur) ou bien est-ce le regard après, porté après coup sur les planches, les séries numérisées ? je ne sais, mais en tout la rencontre du texte, de ta voix, et de la photo, de ton geste, sont juste intelligents et sensibles... (à une prochaine escapade... ton stagiaire officieux)
Images du Quotidien
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